Je renonce à l’écriture de mon manuscrit Les mondes parallèles. L’intention de ce roman est contredite par les faits. Je réunis ses bribes pour un autre texte.
Un paragraphe que le temps emportera :
Puisque la vie est un roman et que les miens constituent la mienne, je reprends le dernier épisode de mon existence. J’y avais commis un meurtre[1]. En compagnie du personnage de mon livre, j’avais accompli un voyage dont on ne revient pas. La mort était celle de nos certitudes matérialistes. Nous avions commencé à explorer celles dont justement il retourne, les Expériences de Mort Imminente. A 58 ans, dans la grande maturité de sa carrière universitaire, mon narrateur avait décidé d’effectuer une dernière recherche. Même à l’Université Catholique de Lima, on ne pouvait encadrer son projet. Seul un directeur de conscience aurait pu le guider. Je lui emboîtai le pas.
J’étais un peu moins âgé que lui mais, dans ce chapitre avancé de notre existence, nous ne pouvions tourner la page sans traiter la question de la mort. Diantre, nous l’avions crainte, agnostiques que nous étions ! Il fallait la regarder de près pour mieux s’en éloigner sur la pointe des pieds. Plus tard, nous apprîmes que les Bouddhistes conseillaient d’affronter ainsi nos tourments terrestres. Nous lûmes Kardec, Raymond Moody, nous rendîmes à une conférence bouddhiste brésilo-péruvienne, interrogeâmes des prélats aux propos jésuitiques dans de vénérables bibliothèques parfumées d’encaustique, arpentâmes le Père Lachaise bien avant d’y poser un pied au détour d’un soleil hivernal. Et tandis que le Chemin de Compostelle changeait la vie de Jim, je réalisai une douloureuse et nécessaire retraite spirituelle dans d’humides collines du sud du Brésil.
[1] Marc Boisson, Il est mort Jim Ezema, 2017