(extrait de mon roman en cours d’écriture)
Alberto, un acteur péruvien, s’est vu offrir un séjour d’une année en France.
C’est avec grand appétit que notre touriste déjeuna le midi dans une brasserie. Il fut étonné de se retrouver collé à d’autres clients. Avait-il été invité à leur table ? Il comprit que non car ils ne lui adressèrent jamais la parole et poursuivirent leurs échanges comme s’il n’était pas là. Le menu était honnête, une planche de charcuterie, une cuisse de canard accompagnée d’un gratin dauphinois et, en dessert, une part de tarte aux pommes. Mais Alberto regrettait déjà la cuisine créole de Lima. Il découvrirait heureusement, plus tard dans son séjour, que l’art culinaire français existait bel et bien en-dehors des circuits touristiques.
Il faut avouer qu’il ne goûta guère mieux la pièce de théâtre qu’il alla voir le soir. Il s’agissait pourtant de La dégustation, au Théâtre de la Renaissance, dans le 10e arrondissement. Il avait déjà eu de la chance d’y trouver une place. L’idée lui en était venue en consultant la revue L’officiel des spectacles à l’hôtel. Il ne pouvait pas ne pas aller au théâtre à Paris et s’étonna de ne pas y avoir pensé plus tôt. Il identifia quatre ou cinq spectacles à un tarif sinon raisonnable, du moins à 2 chiffres. […]. Il sortit de la pièce plutôt satisfait. Le jeu des acteurs était naturel, les dialogues honnêtement écrits. Puis il se dit que la mise en scène était bien conventionnelle, linéaire, les décors redondants et l’intrigue attendue. Pourquoi se rendre au théâtre pour assister à une sorte de petit film de télévision ? Le programme théâtral de la ville faisait la part belle à ce type de spectacles, à ce qu’il avait pu en juger. Il s’attendait à plus d’avant-garde dans la capitale française.
Photo : ©Giovanna Boisson 2022